Les sapeurs-pompiers font malheureusement  face, de plus en plus fréquemment, à des situations d’intervention dégradées (SDI). Violences urbaines, en ville lors de manifestations qui dégénèrent à l’instar de la manifestation anti « loi travail » en mai et juin à Paris; mais également violences en périphérie des villes, au sein de grands ensembles sous tension comme le prouve le tragique épisode d’octobre 2016 à Viry-Chatillon. S’ajoute le risque attentat, dont plusieurs drames ont marqué la nation française sur le territoire national. Ces attentats, dont le Bataclan et Nice, par le nombre considérable de blessés ont conforté le travail déjà mis en place quotidiennement dans les centres de secours : entraîner nos sapeurs-pompiers à l’intensité . Intensité technique, intensité physique et intensité émotionnelle sont les nouveaux maîtres mots de la préparation de toute une profession. Intensité dans l’entrainement ne signifie en aucun cas, épuisement du personnel avant l’intervention. Décryptage.

Le travail technique

Le terme drill s’appliquait aux méthodes d’entraînement mécanique de l’armée prussienne de Frederic II. À l’époque contemporaine, c’est le terme utilisé par tous les corps qui ont besoin d’un entraînement composé d’une série d’exercices qui permet, par leur répétition acharnée, de rendre les soldats, pompiers, ou autres corps semblables, aptes à exécuter sans hésitation, rapidement et sans faute, les manœuvres correspondantes dans les situations de stress extrême.

Afin de soutenir l’intensité de ces nouvelles situations dégradées d’intervention chaque sapeur-pompier à besoin de répéter mainte et mainte fois les gestes et actions qu’il aura à effectuer à un moment de danger avéré.

Du sapeur à l’officier commandant les opérations de secours, chacun doit à son niveau s’entraîner et faire de ses actions des « automatismes » car le moment venu plusieurs filtres s’additionneront , troublant l’efficacité de chaque pompier. Ces filtres sont nombreux.

Tout d’abord le stress, ce sentiment qui vous traverse le corps, et qui s’avère souvent être un moteur, un élan pour se dépasser afin de réaliser la mission. Ce stress peut malheureusement parfois enfermer le sapeur-pompier dans un « tube cognitif » altérant sa capacité de décision, d’exécution et de priorisation des tâches.

Le port de l’équipement de protection s’avère être un perturbateur dans la décision: température corporelle, manque d’aisance, poids. Mais également le moment de départ en intervention. Les événements graves auxquels font face les sapeurs-pompiers ne surviennent jamais au moment où l’on s’y attend.

L’un des filtres principaux est également la condition physiologique du sapeur-pompier au moment du départ: fatigue, faim, manque de sommeil. Et pourtant l’urgence de la situation lui demandera d’être au maximum de ses capacités.

C’est donc en répétant avec acharnement les gestes et actions individuelles et collectives, qu’elles deviendront des « automatismes » et donc très bien réalisés le jour J.

Le travail physique

Le travail physique est la base de tout entrainement dans un tel type de corporation. D’une part pour répondre aux exigences physiques imposées par les interventions mais également car l’entrainement forge la résistance morale et psychique de tout acteur de « l’extraordinaire ». Il est souvent prouvé et de façon familière dans l’effort  » quand le corps souffre, la tête souffre » . C’est pour cela qu’un intervenant habitué à atteindre ses limites voire les dépasser est plus apte à se dépasser sur une situation de crise. L’entrainement pour faire face à une telle intensité s’exécute par un travail adapté, du type « montées de marches », parcours opérationnels, parcours répartis sur plusieurs ateliers et dont la conjugaison des différents domaines d’action du sapeur-pompier (secourisme, incendie…), lui permettra de les effectuer avec automatisme. Un entrainement régulier des gestes d’urgence dans tout type de situation et tout type de tenue permet d’assurer ces gestes quelque soit le contexte environnant. L’entrainement physique passe aussi par un travail de coordination appuyé . Harmoniser et hiérarchiser les gestes dans un soucis d’efficacité est nécessaire au quotidien mais surtout dans une situation stressante. Enfin, l’entrainement physique quotidien et régulier permet de façon assurée la préservation des blessures sur les interventions de grande ampleur ou de longue durée.

Le travail mental

Afin d’être logique et pertinent dans l’exécution de ses gestes, le sapeur-pompier doit se contraindre à se calmer. Il le fait déjà aisément au quotidien en portant le masque d’assistance respiratoire au milieu de locaux enfumés, mais il est aujourd’hui question d’effectuer des gestes sous la pression des cris des victimes, des coups de feu, voire d’explosions successives ou simultanées. Agir avec calme et sérénité est la base de toute opération d’urgence, afin que les pompiers ne se mettent pas en danger et réalisent leur mission en toute sécurité avec en permanence à l’esprit la sécurité des victimes. De plus, entraîner son esprit à de telles situations permet au sauveteur de fixer son esprit sur la réalisation de ses gestes, uniquement dans un soucis d’efficacité. Comme écrit précédemment, c’est en s’habituant à travailler dans des situations de stress extrême que l’on fait face efficacement aux situations extrêmes.

Pour conclure, les sapeurs-pompiers sont les primo-intervenants et font face à des situations déstabilisantes, stressantes, troublantes et jusque alors ils ont réalisés des opérations d’une intensité extrême, avec un grand professionnalisme. L’entrainement est une affaire quotidienne, et ils poursuivent leur objectif : faire face en toute situation.