En intervention, le commandement des opérations repose sur la capacité des pompiers à conserver une conscience fine de la situation tout au long de l’engagement. La conduite des opérations, assurée par le COS, vise à analyser l’événement, définir des objectifs clairs, organiser la manœuvre et garantir la sécurité des intervenants. Lorsque cette conscience de la situation se dégrade, la manœuvre perd en cohérence, l’initiative s’affaiblit et le risque opérationnel augmente. Identifier les indicateurs de perte de conscience de la situation constitue donc un levier central pour maintenir la maîtrise tactique, adapter l’action et sécuriser l’intervention incendie.

1. Ambiguïté dans l’analyse de situation

L’ambiguïté apparaît lorsque la situation opérationnelle est mal caractérisée ou insuffisamment comprise. Par une reconnaissance initiale insuffisante, les informations disponibles sont incomplètes, contradictoires ou mal hiérarchisées.
Le commandement ne dispose pas d’une vision claire des enjeux, ce qui complique la définition des objectifs opérationnels et la priorisation des actions. Cette ambiguïté peut concerner la nature du phénomène, son extension, son évolution prévisible ou les risques associés. Elle constitue souvent le point de départ d’une perte de conscience de la situation.

2. Distraction dans la conduite des opérations

La distraction survient lorsque l’attention du COS ou des chefs de secteur se détourne de l’objectif principal. Elle est fréquemment liée à une surcharge des échanges radio, à la gestion simultanée de problématiques secondaires ou à des sollicitations multiples.
La conduite des opérations perd alors en clarté : les décisions deviennent réactives plutôt qu’anticipées, et la cohérence globale de la manœuvre s’affaiblit.

3. Fixation tactique

La fixation tactique se traduit par une focalisation excessive sur une action, un point d’effort ou un problème particulier. Cette concentration exclusive entraîne une perte de vision d’ensemble et empêche l’adaptation de la manœuvre à l’évolution globale de la situation.
Le commandement continue à renforcer une action devenue inadaptée ou insuffisante, au détriment d’une réévaluation globale de la situation et des objectifs.

4. Surcharge du COS

La surcharge apparaît lorsque le volume d’informations, de décisions et d’actions simultanées dépasse les capacités de traitement du commandement.
L’absence de hiérarchisation claire empêche la maîtrise du tempo opérationnel, la priorisation des missions et l’anticipation. Cette surcharge favorise les décisions tardives, incomplètes ou incohérentes et affaiblit la conduite des opérations.

5. Routine opérationnelle et excès de confiance

L’expérience et l’habitude peuvent conduire à un engagement fondé sur des schémas connus, sans remise en question suffisante. Cette routine opérationnelle génère un excès de confiance qui masque les signaux faibles et conduit à une sous-évaluation des risques.
La situation est alors assimilée à tort à un scénario maîtrisé, alors que ses caractéristiques réelles ou son évolution justifient une adaptation de la manœuvre.

6. Écart non justifié aux principes et procédures opérationnelles

La perte de conscience de la situation se manifeste également par des écarts aux principes d’engagement ou aux procédures opérationnelles sans justification tactique claire.
Ces déviations ne résultent pas d’une analyse bénéfice/risque formalisée, mais d’une adaptation non maîtrisée, souvent liée à la pression opérationnelle ou à une mauvaise lecture de la situation.

7. Incohérences non traitées

Les incohérences apparaissent lorsque les informations issues des reconnaissances, des comptes rendus terrain ou des observations ne concordent pas avec la manœuvre engagée.
L’absence de remise en question de la situation initiale et le non-traitement de ces écarts conduisent à une rupture de cohérence décisionnelle et à une dégradation progressive de la conduite des opérations.

8. Perte de l’initiative opérationnelle

La perte de l’initiative se caractérise par une action subie plutôt que conduite. La manœuvre offensive est inexistante, inefficace ou inadaptée malgré les moyens engagés.
Le phénomène évolue plus rapidement que la capacité du commandement à réagir, traduisant une perte de maîtrise de la situation et un affaiblissement de la conduite des opérations.

Conclusion

La perte de conscience de la situation constitue un facteur majeur de dérive opérationnelle. Elle s’installe progressivement par l’apparition d’indicateurs identifiables, souvent banalisés dans l’action. La reconnaissances permet au COS de réévaluer la situation, de réajuster les objectifs et de rétablir une conduite des opérations cohérente et maîtrisée.